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Photo du rédacteurnathalie gonzalez

Quand la sexualité fait mal

« Ca fait mal mais bon c’est comme ça on peut rien y faire ? Et puis on m’a toujours dit qu’il n’y avait rien d’anormal à l’examen, ça doit être dans ma tête »

Si j’avais reçu un euro à chaque fois que j‘ai entendu cette phrase je serais riche ! Il y a une phénomène incroyable mais vrai dans cette société : 8 à 20 % des femmes (selon le études) décrivent des douleurs pendant leur rapports sexuels. Et tout le monde (je pourrais dire s’en fout mais ce n’est pas de moi;)) semble avoir intégré cet état de fait. Les femmes, les hommes, et même j’ose dire le corps médical.

Pourquoi tant de femmes continuent à pratiquer un activité qui leur provoque de la douleur ? Pourquoi tant d’hommes continuent à pratiquer une activité qui provoque de la douleur à leur partenaire ? La question suscite des discussions intéressantes et pas toujours faciles en consultation. Mais dans tous les cas il ressort que plaisir et douleur ne font pas bon ménage...


Que se passe t'il dans le corps et le cerveau quand la sexualité fait mal?

L'histoire se déroule souvent ainsi:

Une douleur est présente quelle qu’en soit la raison, j’y reviendrai plus en détail.

Si la sexualité est pratiquée malgré la douleur, le cerveau reçoit un message négatif : le sexe fait mal.

Celui-ci déclenche des réactions corporelles en vue d’empêcher le sexe de se produire :

  1.  il ferme la porte d’entré, c’est à dire provoque un réflexe de fermeture des muscles du périnée

  2. il stoppe la lubrification vaginale car il ne veut pas de sexe donc il bloque les réactions sexuelles

Conséquence : ça fait encore plus mal car les muscles sont serrés et le vagin est plus sec.

Et si l'activité sexuelle continue le cerveau renforce encore la fermeture des muscles et la sécheresse du vagin, c’est même tout le corps qui devient tendu. Bien sûr il n’y a pas de place pour le plaisir là dedans. Au niveau émotionnel se rajoute souvent l’appréhension de la douleur qui augmente encore les tensions musculaires, de la culpabilité de ne pas être « normale » , parfois même de l’agacement ou de la colère.

Lors de la prochaine rencontre sexuelle, ou au bout de quelques expériences similaires, le cerveau va même déclencher ces réactions AVANT la douleur, il anticipe.

Si sexe et douleur sont associés, ça devient réflexe, le corps se ferme avant même d’en arriver à une éventuelle pénétration.

Si la situation perdure le désir sexuel peut diminuer jusqu’à disparaître. En effet qui a envie de faire quelques chose qui n’est pas agréable et en plus fait mal. Si les rapports sexuels sont encore pratiqués en l'absence de désir il y a encore moins de lubrification donc encore plus de douleur.

Alors au bout d’un moment risquent d’arriver les stratégies d’évitement : comment éviter les rapports sexuels. Ne pas se rapprocher, éviter le contact, se coucher à un autre moment… Cela peut vite conduire à un éloignement affectif des deux partenaires et à une diminution de la complicité, même en dehors de la sexualité.

Cette histoire est un peu déprimante et tout le monde n’emploie pas exactement ce chemin là mais ce n’est pas rare non plus qu’insidieusement, par fatalité, sans trop savoir comment faire autrement, ce schéma finisse par s’installer. Alors comment faire ?


Une autre perspective

Il est nécessaire de considérer la douleur de départ ET les conséquences de la douleur.

La première chose à faire sera de démêler les fils : la cause de la douleur de départ est elle encore là et dans ce cas il faut la traiter avant toute autre prose en charge. La cause a t’elle disparu mais ce sont les conséquences de la douleur qui posent problème : appréhension, contraction réflexe du périnée, manque de lubrification et de plaisir, baisse de désir, éloignement du couple...

Les causes de la douleur

Commençons par les causes de la douleur. Il faut différencier les douleurs profondes (au fond vu vagin) et les douleurs superficielles (entré du vagin et vulve). Les dyspareunies profondes chroniques (plus de 3 mois) peuvent être dues à de l’endométriose, des varices pelviennes, un utérus rétro versé, elles sont d’intensité et de fréquence variable, dépendent parfois des positions sexuelles. Certaines sont difficiles à traiter, je ne vais m’attarder sur cet aspect ici, mais elles peuvent déclencher les mécanismes décrits plus haut et provoquer secondairement une douleur à l’entré du vagin par contraction réflexe des muscles du périnée. Les dyspareunies profondes qui apparaissent rapidement sont plutôt dues à une infection (chlamydia par exemple), un kyste à l’ovaire…

Les douleurs à l’entrée du vagin peuvent être infectieuses (mycose, vaginose), dermatologiques (eczéma, psoriasis, lichen), cicatricielles (post accouchement ou autre).

Ce type de douleurs mal prises en charge peuvent provoquer une hypersensibilisation de la zone, comme quand on fait se mal plusieurs fois au même endroit, ça reste sensible, c’est la vulvodynie.

Cela peut arriver typiquement dans le cas d’une mycose à répétition mal soignée ou au contraire des traitements anti mycosiques appliqués alors qu’il n’y a pas de mycose. Là encore je ne vais pas rentrer dans les détails de la prise en charge mais en cas de douleur il ne faut pas attendre même si parfois le plus gros défi est de trouver des professionnels formés aux problèmes de vulve.

Les conséquences de la douleur

Venons en aux conséquences de la douleur. J’ai nommé le réflexe de contraction du périnée et la diminution de la lubrification pour fermer la porte.

 Quand le cerveau et le corps essayent de fermer la porte, le plus sage est de ne pas chercher à forcer l’entrée.

Lu comme ça cela semble évident mais pourtant ce n’est pas souvent comme ça que ça se passe. Il est nécessaire de réfléchir au sens de la sexualité : pourquoi avons nous des rapports sexuels ? Certainement pas pour cocher des cases d’actes à accomplir. Que diriez vous de « avoir du plaisir sexuel ensemble et se connecter émotionnellement » ? Donc finalement on peut réfléchir ainsi : quels ingrédients peut on mettre dans nos relations sexuelles pour atteindre cet objectif ? Il est probable alors que les pratiques douloureuses ne s’invitent pas dans la liste. Le plus souvent c'est la pénétration qui provoque la douleur. La deuxième chose à faire, après donc l’analyse et si besoin le traitement de la cause, sera de déshabituer votre cerveau à l’association sexe=douleur afin de le réhabituer sexe=plaisir. Ça ne se fera pas en une fois, ça prend même plus de temps à défaire que ça a mis à se faire. Mais c’est possible. Cela implique de ne plus pratiquer la pénétration si c’est cela qui fait mal mais de garder sa sexualité vivante et créative. Et si le couple s’est déjà éloigné l’un de l’autre pour éviter la douleur il sera utile de se reconnecter afin de pouvoir revivre de la sexualité ensemble.

Dans tous les cas le fait de poser ensemble « l’interdit » de la pénétration permet d’entrer sans appréhension dans les échanges sexuels : "Quoi qu’il arrive je n’aurai pas mal ».

Il s’agit d’un préalable indispensable pour retrouver la légèreté, le plaisir, la joie dans la sexualité. Ensuite seulement la pénétration pourra être envisagée à nouveau, après avoir traité la cause éventuelle, attendu la régénération des tissus si besoin, appris à détendre son périnée et tout son corps, et ne plus vivre une sexualité par devoir. C'est déjà beaucoup mais la pénétration se reprendra progressivement, délicatement, sans pression de réussite, en sachant qu’on s’arrêtera à la moindre douleur. Le mieux pour cela est que madame soit aux commandes du mouvement. Car même en étant le plus délicat du monde aucun partenaire ne peut savoir immédiatement quand la douleur arrive chez l'autre. Là encore on change de paradigme. Ce n’est pas le pénis qui rentre dans le vagin. C’est le vagin qui vient entourer le pénis, ça s’appelle la CIRCLUSION, un mot et une pratique qui gagnent à être connus !


En résumé, le sexe c’est bon quand c’est bon, la douleur n'a rien à faire dans l'histoire!

Pour aller plus loin:


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